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Trophée Bois IDF bâtiment public

15.06.2015

Article paru sur le site http://bois.fordaq.com

Trophée Bois IDF bâtiment public

 

Le lycée professionnel de 800 élèves (capacité) à Dammartin-en-Goële a été livré en 2014 et placé sous le feu (des projecteurs) en janvier dernier au point qu'il pourrait être baptisé Charlie. Il n'a pas eu besoin de cela pour remporter le 1er Trophée bois IDF en catégorie bâtiment public, devant l'extraordinaire mais un peu plus ancien et déjà très médiatisé groupe scolaire Abdelmalek Sayad, l'école des Zéfirottes-Stéphane Hessel de Montreuil, livrée au même moment, ne concourant que pour le Trophée IDF 2015.

L'opération surprend par sa taille au sol (12 000 m2 de surface de plancher), le coût total étant de plus de 21 millions d'euros, avec un lot bois à plus de 4 millions. En comparaison, Le Lycée international de Nantes, c'est 50 millions de travaux et le lycée Jean Moulin de Revin, à livrer fin de l'année, 27 millions pour 17 000 m2. L'architecte Phine Dottelonde n'est pas répertoriée comme spécialiste de la construction bois au même titre que Nicolas Favet ou Méandre. Tout de même, le projet est encadré par Sylva Conseil (BE bois), Alto Ingénierie (BET), Lifteam (bardages)... Franco-Danoise, Phine Dottelonde avoue volontiers que ce lycée est sa première réalisation en bois. Et c'est très bien ! Elle apporte en tout cas un regard nouveau, décalé, on aurait risqué dire féminin si la part danoise ne semblait pas plus parlante, ces Danois qui ont une sensibilité si particulière pour le meuble en bois contemporain.

Le charpentier Goubie (77) est co-traitant du lot charpente avec Sicra entreprise générale qui assure 80% des lots, ce qui le place en position de force. Le projet s'étend sur un vaste rectangle orienté NSEW et isole la piste de 150 m pour la pratique de la conduite de camions et véhicules de manutention à l'extrémité est, les différents bâtiments s'additionnant comme obstacle phonique pour préserver à l'autre extrémité le calme de l'internat et les logements de fonction. L'articulation prend en compte la possibilité future d'une extension par simple ajout d'une "barrette" de classes dans un espace actuellement végétalisé. L'architecte a sciemment cassé l'organisation orthogonale pour créer une cour intérieure où son souci esthétique ressort tout particulièrement.

Sur le plan de la structure, foin de performances C02 ou de record tout bois. Les bâtiments s'élèvent sur un socle en béton (habillé de bardages), ce qui facilite quelque porte-à-faux. Les "barrettes" de classe en rectangle comportent un couloir central aux circulation entourées de voiles en béton banché peint qui se chargent du contreventement de la charpente. Le bois, omniprésent en bardage, réapparaît dans les classes et autres salles du lycée, y compris l'auditorium, par un recours massif à des lames de bois HunterDouglas. C'est le Néerlandais Derako qui fabrique en exclusivité désormais pour HunterDouglas des lames à l'emboîtement longitudinal rainure et languette très précis. L'essence en pin est lasurée/vernie (M1) pour obtenir un ton plus clair. Les lames sont usinées en face cachées et pourvus de rails pour empêcher toute déformation. Pour l'ossature, HunterDouglas recourt à son système maison développé à l'origine pour les lames aluminium. 6000 m2 le lames bois font de ce chantier une opération majeure pour le fabricant. Mais l'architecte se montre encore plus soucieuse des façades.

"Les lignes de vie apparentes, très peu pour moi".  Les acrotères sont gérés en conséquence, masquant des toitures finalement végétalisées et non pas couvertes de panneaux photovoltaïques qui auraient permis de revendre de l'électricité. Pour les bardages, la trame ajourée verticale de 40x60 mm de section est généralisée. De l'épicéa/sapin trempé gris (autoclave + saturateur) qui joue avec le voile noir et contraste avec des zones en douglas non traité en partie basse. Une idée fixe, éviter toutes les moustaches et coulures, donc autant que possible toutes les fixations apparentes. L'architecte reconnaît s'être inspirée des pratiques danoises de façades bois goudronnées. L'isolation est de 20 cm sur OSB, sachant que l'ensemble, avec une consommation chauffage de moins de 15 Kwhep/m2 SHON/an (62 au total en moyenne) et une ventilation double flux, tutoie le niveau Passivhaus. Aussi, pour les baies, un compromis original est trouvé, les vitres restent fermées mais le meneau vertical opaque est ouvrant. Une PAC sur nappe phréatique à 80 m complète le dispositif pour une performance BBC labellisée, démarche HQE. Dans les ateliers, le bois est apparent en structure et l'acoustique est traitée par des panneaux OSB macroperforés.

L'approche est saisissante et intéressante par des choix si marqués pour la grammaire des façades ou les lames omniprésente en intérieur. On pourrait dire que c'est une référence incontournable de l'architecture bois scolaire en Ile-de-France. Toutefois, l'architecte assume ses choix qui conduisent à utiliser économiquement le béton banché en contreventement. On peut cependant se demander si l'aspect de ces voiles béton des circulation, quoique peints, cadre bien avec la finesse et le rythme du traitement de la façade, prolongé par le passerelle élégante qui relie les espaces.

 

[ Jonas TOPHOVEN - FORDAQ - Publié le 15/06/15 ]